Celle d’après

Elle est celle d’après. Celle qui viendra après.

Celle que tu n’attendais pas ou plus, tes deux ailes abîmées ne pouvant plus battre pour te faire renaître.

Et elle, elle sait qu’elle est et sera celle d’après . Celle qu’on espérait pour toi, celle qui, si elle avait pu ne serait ce que dessiner un sourire sur tes lèvres, serait peut être l’ancre qui te permettrait de croire encore à la vie.

Elle l’a de suite compris, accepté comme si elle-même avait déjoué le destin pour parvenir a cette fin. Par faute de savoir vivre – ou de vouloir vivre – pour elle-même, elle est un Saint-Bernard de l’amour.

Tu vis, ton cœur bat a nouveau d’une toute autre manière, tu veux y croire. Elle se nourrit de ton bonheur pour voiler son mal-être qu’elle juge indécent et inavouable de devoir égaler celles d’avant en étant elle, celle d’après.

Vous lui direz que chacune arrive toujours après celle d’avant. C’est ainsi. Mais elle, elle remplace celle d’avant qui aurait dû, si le destin n’avait pas été injuste, être toujours là; à sa place, à elle, celle d’après. Elle a souri en criant très fort à l’intérieur de son corps quand elle était à tes côtés et que s’immiscait entre elle et toi les photos de celle partie trop tôt, celle qui devait être à sa place, à tes côtés. Elle s’excusait en quittant sur-le-champ une anodine discussion où tu nommais juste son prénom, où certains bienveillants te demandaient comment tu allais « sans elle ». Et elle était là. Et elle ne pouvait pas te dire combien elle s’en voulait d’être là, à sa place; combien elle s’en voulait de souffrir de sa position.

Et aussi belle soit votre relation, aussi heureux soient les projets et l’avenir que vous mûrissiez, elle se dit et se dira que cette vie n’est pas la sienne mais celle que tu devais construire avec celle d’avant.

Et le temps n’efface rien, les traces restent dans ce monde numérique devenu effrayant. Quand elle écrit tes nom et prénom sur les réseaux sociaux, ce n’est pas une photo d’elle et de toi qui s’affiche en amont. Ce n’est pas une publication te nommant sur son profil.

Ce sont les dernières images de celle d’avant et de toi. Ce sont tes écrits amoureux, tes mots poignants pour dire « au revoir », c’est cette phrase qui est ancrée dans ses pensées depuis le premier jour; tes mots criant ton amour éternel, à jamais pour elle.

Et celle d’après vit avec cette tacite et honteuse souffrance. Car elle ne peut en vouloir à personne si ce n’est à elle-même. Car accepter d’aimer celui dont le grand amour fut arraché est un poids qu’elle s’inflige.

Celle d’après est arrivée pour lui rendre foi en la vie, elle a même rêvé que tu puisses retrouver foi en l’amour. Mais elle sera toujours celle qui sera entrée dans ta vie sans crier gare, sans cris ni fougue. Elle est et sera là.

Elle a compris, accepté qu’elle ne porterait pas ton nom; c’était le graal promis à celle d’avant. Et elle l’accepte sans sourciller, elle a suffisamment de ressources après tout pour chercher son bonheur par elle-même, comme elle a toujours fait avant toi.

Et le temps qui passe, et les années qui défilent n’y changent rien. Elle sait, tu lui as dit, que si le destin n’avait pas décidé d’en faire autant, oui, sans doutes serait-elle aujourd’hui à sa place. Parce que tout était beau, gai, coloré avec elle. Celle d’après est donc une imposteuse qui n’aurait pas du être là; tu lui as dit, en totale bienveillance.

Elle aimerait réveiller tes fantômes et leur cracher à la gueule car même absents, ils attisent sa souffrance. Mais c’est indécent, on ne peut critiquer ceux qui ne sont plus. Alors elle fait comment?

Elle n’a pas à vouloir être aimée davantage que celle d’avant; tu l’aimes, cela suffit non? et tu penses parfois à ce qui se passe dans son esprit? Sais tu le nombre de fois où elle a ce doute, cette interrogation prégnante:

  • combien de fois pense-t-il à elle?
  • Combien de fois voit-il les dernières images de son visage?
  • combien de fois s’est-il dit que ça, c’aurait été mieux avec celle d’avant?
  • combien de fois a-t-il pensé tout bas « si elle était toujours là… »?

Et ça, elle seule doit vivre avec cela. Parce que cela est inaudible pour la plupart, parce qu’elle doit courber l’échine en étant celle d’après. Parce que celle d’avant sera toujours présente, bien plus que les vivantes. Alors elle la déteste, inavouablement, pour rester à sa place, la place de celles qui viennent après.

A ma princesse… et pour ses futurs princes…

Tu sais, ma petite princesse, faudra pas trop que tu y croies au prince charmant.
Au pire, tu lui négocies son cheval et tu t’en vas bien vite.
Moi aussi, comme nous toutes, nous y avons cru.
Nous avons cru à ces histoires qui ne s’arrêteraient jamais, ces histoires d’amour toujours.
Mais je t’assure, n’y crois pas de trop.
Tu peux y croire, certes, car c’est beau une fille qui rêve. Mais quand tu redescendras sur Terre, quand tes rêves commenceront à te faire souffrir, alors convaincs toi que tu ne dois plus courir vers cette utopie.
Mais tu peux rêver d’amour.
Tu peux rêver de complicité, de complémentarité, d’évidences et de connivences.
Tu peux croire à cela car ça arrive crois moi.
Mais ce que les contes et rêves ne t’expliqueront pas, moi, je veux m’y essayer.
Parce que je ne veux pas que tu souffres de trop. Car tu auras mal parfois. Mais si tes blessures peuvent n’être que bénignes alors j’aurai tout gagné.
La seule chose que je veux que tu comprennes et ce n’est qu’à trente cinq ans seulement que je m’en rends pertinemment compte, c’est que le vrai prince charmant, comme celui de blanche neige, il est VENU. Il a AGI.
Il ne lui pas envoyé mille textos pour lui dire qu’ils allaient avoir une vie idyllique, dans un penthouse luxueux, avec trois enfants en parfaite santé.
Il n’a pas eu le coup de foudre pour elle en likant sa photo sur Tinder.
Il ne lui a pas vendu du rêve par de jolis mots sur messenger.
Il l’a vue et à tout fait pour la sauver de sa vie, pour la retrouver et lui prouver qu’il l’aimait elle, elle seule parmi toutes les autres du royaume.
Si tu tombes sur un garçon ainsi, tu peux oser ouvrir ton cœur, te mettre à nu et te battre pour que votre histoire grandisse et s’embellisse.
Mais à côté des ces vrais princes, ma petite princesse, tu tomberas évidemment amoureuse de tous ces faux princes. Ceux qui ne seront jamais rois et avec lesquels tu ne seras qu’une princesse de pacotille.
Et c’est avec eux que tu pleureras. C’est ces histoires qui te feront penser à 16,17ans que l’amour c’est trop dur. C’est à cause de ces princes baratineurs que tu tomberas bas, que tu douteras de toi, de ton être, de ton corps.
Mais tu les aimeras. A en crever.
Tu t’y accrocheras, jusqu’à y perdre ta dignité.
Tu te rattacheras à leurs belles paroles, aux signes infimes que toi seule voudra voir.
Tu espèreras même s’il ne te reste qu’une microscopique lueur d’espoir.
Tu attendras.
Qu’ils changent.
Qu’ils se rendent compte.
Qu’ils reviennent.
Qu’ils tombent à leur tour réellement amoureux de toi.
Et tu auras mal.
Et je ne sais même pas si je saurais adoucir cette souffrance car toi seule aura en toi les armes pour la combattre et l’amoindrir.
Et quand tu te seras relevée de tes blessures, tu te diras que le prochain, tu veux un gentil. Un vrai gentil. Avec ou sans cheval. Avec ou sans château.
Celui qui te montrera combien il t’aime et combien tu es unique.
Pas celui qui te dira qu’il t’aime et que tu es l’unique.